lundi 23 novembre 2015

Thanks to...

Merci à tous ceux qui ont rendu possible le voyage en Haïti en commençant par Sophie Hrasko,  directrice de radio Jerico Metz qui nous a laissés partir ensemble.

Jeanine Ortiz pour sa précieuse contribution, Claire Guignard qui a passé 2 années ici comme volontaire et nous a mis en contact avec Pierre-Antoine Colas le directeur de l'école St-Joseph et Dominique Saint-Lôt de la Maison de Charité, Gilles Vincent conseiller des jardins de Chenshan à Shanghai pour le lien avec Martine Elisabeth Mathieu qui elle-même nous a dirigés vers Kesler Bien-Aimé.

Frédéric de Ravinel directeur du lycée professionnel Saint Vincent de Paul à Algrange pour nous avoir mis en contact avec Christelle Rocheteau de l'association SOS Enfants qui nous permis de trouver un logement à Port-au-Prince et de visiter la Cité Soleil. Georges Toussaint son directeur, les élèves et les enseignants. Rosematte et Jérémie qui ont pris soin de nous dans la maison de Meyotte.  Jean-Marc Kiffert, messin à qui nous devons la rencontre avec son neveu François qui lui même nous a permis de rencontrer ses amis Carmen et Christian. 

Jean-Ruid Senatus à l'hôtel Florita qui nous a invités à passer une nuit dans son bel hôtel historique  et dirigés vers son voisin d'en face, l'artiste Moro.  Nadège Slagmulder directrice de l'Alliance Française pour le rendez-vous avec Jean-Elie Gilles. Enfin Frantz et mimi le chat pour la brise de Coterelle. 

A bientôt pour écouter Haïti  dans « Suivez le guide » sur Radio Jerico et les autres radios du réseau Cofrac 

Jour 1. Ou lakay ou ! (Ma maison est ta maison en créole)




Destination Port-au-Prince mais nous prendrons notre temps pour rejoindre Haïti. Le chemin des écoliers mais c'était plus économique de transiter par Atlanta où nous passerons 24 heures suite à une annulation de vol. Et nous apprécions le confort et le service de Delta Airlines avec les nouveaux sièges très confortables même en classe éco. le repas très correct et une équipe en cabine aux petits soins pour nous. Le temps d'assister à un match de basket au Philips center qui jouxte CNN.. 



Les Hawks d'Atlanta contre les Pélicans de New Orleans. C'est un véritable show...à l'américaine bien sûr   Chear leaders, hommage aux veterans, c'est le jour, et les Hawks ont gagné !  Excellents hamburgers au menu, dégustés dans l'immense hall de CNN. 



Le lendemain matin, avant le décollage, nous avons rendez-vous avec Bernard Kippelen, un alsacien à Atlanta, professeur et directeur au Center for Organic Photonics and electronics de Georgia Tech, vice président de l'Institut Lafayette inauguré en 2014 à Metz qui nous reçoit dans son bureau sur le campus. Nous parlons futurs écrans télé organiques que nous transporterons roulés sous le bras comme ceux de nos bonnes vieilles soirées diapos. 


Quelques achats aux boutiques CNN et Coca-Cola, mugs et tee-shirts avant d'embarquer pour Haïti où nous nous posons à 19H30. Les formalités douanières sont réglées en quelques minutes, il fallait être plus patient en entrant aux Etats-Unis. Dieu est venu nous récupérer à l'aéroport. Etre conduits et sous la protection de Dieu c'est un première ! Dieu c'est le chauffeur qui nous mène vers la maison d'accueil de l'association Enfants Soleil dans le quartier de Meyotte où nous séjournerons à Port-au-Prince. Jeremy et Rosematte, deux étudiants bénévoles en ont la responsabilité et nous y accueillent chaleureusement. Tanguy, grand garçon  nantais y a pris ses quartiers depuis presque 3 semaines. 22 heures,la fatique se fait sentir, extinction des feux. 


Jour 2: Collines que j'aime !



On se réveille tôt à Haïti. Après la douche et le café, il nous faut trouver un téléphone pour les premiers contacts. Dieu nous récupère à 9H. C'est un luxe, aujourd'hui nous aurons une voiture avec chauffeur. Pas tout à fait dans notre budget. 3 rendez-vous sont calés pour cette première journée. Difficile d'estimer une heure d'arrivée précise, les temps de trajet à Port-au-Prince sont liés aux bouchons fréquents. (Nous le vérifierons en fin d'après midi ) Pierre Antoine Colas, volontaire Fidesco dirige l'Ecole Professionnelle Saint Joseph Ouvrier. 


Une centaine de lycéens vont effectuer leur rentrée scolaire la semaine prochaine. Les premières impressions haïtiennes que nous recueillons sont celles d'un français qui a décidé d'offrir deux années de sa vie avec sa famille, épouse et enfants à la population haïtienne. 


Pour lui pas de mirobolant salaire d'expat, mais une indemnité qui lui permet de vivre correctement sachant que son épouse travaille également.


Nous sommes dans le quartier vallonné de Canapé Vert où la famille s'est installée en immersion totale. C'est Claire, autre volontaire il y a quelques années qui nous a mis en contact. 


Elle a également fait le lien avec Dominique Saint-Lôt de la Maison de Charité à deux cents mètres de l'école, voulue par Marthe Robin qui vécut un demi-siècle alitée, paralysée sans s'alimenter. Quelques centaines de mètres à parcourir. 



Dominique nous reçoit très chaleureusement dans ce beau lieu de retraite avec une vue exceptionnelle, depuis la terrasse, sur la baie de la capitale. 



Elles sont 18 laïques au sein de cette communauté. Un groupe d'une cinquantaine de personnes, des couples, sont attendus en milieu d'après midi. En cuisine, on s'affaire déjà pour préparer le dîner, au menu de sera le bouillon, l'un des plats traditionnels haïtiens, un bouillon riche en viande, légumes, et épices. Nous n'avons pas eu le temps de déjeuner ou plutôt de dîner, dit on ici pour le repas de midi....comme en Belgique.



Ce qui nous étonne aussi, dès midi on se dit « Bonsoir ». Nous sommes interrompus dans la rédaction de notre blog par l'annonce des attentats parisiens dont Le Bataclan et son terrible bilan. Nous sommes en état de choc. Le danger n'est pas forcément à 7000 km même si des tirs ont encore retenti avant notre arrivée à Petionville, toute proche. . 



Nous avons du mal à croire ce que nous lisons sur les premiers communiqués. Mais reprenons le cours de notre journée...Nous devons retrouver à présent Kesler Bien-Aimé, photographe et sociologue. Il a consacré un livre à Jean-Jacques Dessalines, fondateur de la patrie haïtienne. François Hollande a paraît il eu quelques difficultés à prononcer correctement son nom lors de sa visite au printemps dernier. 



Il a également publié un ouvrage sur les affiches des  dizaines de candidats en campagne pour la présidentielle, il y a 10 ans qui s'entre-déchirent littéralement déjà sur les murs, alors que les résultats du premier tour de l'élection  2015 ne sont pas encore connus plusieurs jours après le scrutin.


C'est déjà le milieu de l'après midi, il est temps de retrouver notre maison Soleil. Nous y dînerons avec notre nouvelle famille d'accueil. Notre première journée a été riche en belles rencontres mais endeuillée par ce carnage parisien. Demain nous allons retrouver un mosellan de Port-au-Prince.



Jour 3: Easy riders


Réveil matinal et grasse matinée jusqu'à 7 heures...


Spaghettis au petit-déjeuner. Jérémie et Rosematte sont toujours aux petits soins pour nous. François, un français, mosellan côté paternel, nous récupère au pont Meyotte qui marque l'entrée du quartier. Il nous invite dans la superbe villa avec vue exceptionnelle qu'il loue avec son compagnon salarié d'une société française qui assume le loyer élevé de 2500 $ mensuels. 


Ils sont arrivés quelques semaines après le tremblement de terre et ont été confrontés d'entrée aux victimes qui n'avaient pas toutes encore été retirées des décombres. François n'oublie pas l'odeur de mort qui imprégnait encore l'air de Port-au-Prince. Ses propos reflètent la déception de voir un pays où rien n'évolue. Une société dans laquelle les riches ne pensent qu'à leur propre enrichissement et où les pauvres, de plus en plus pauvres s'entassent dans des quartiers ghettos comme la cité Soleil que nous devons découvrir lundi matin, où règne l'insécurité. 



François, qui est notamment designer, travaille pour une petite usine, crée par un couple d'haïtiens, produisant un artisanat expédié en Amérique du Nord. Il veille au suivi du cahier des charges pour les enseignes américaines qui assureront la distribution. Le salaire journalier approche les 5$ dîner compris (déjeuner pour nous), c'est un plus par rapport à d'autres employeurs. L'art Haïtien est présent sur tous les murs de la grande maison. C'est le pays le plus pauvre du continent américain  mais un pays d'artistes talentueux !



Installés depuis notre arrivée dans notre « maison Soleil » sur les collines de la capitale, nous souhaitons nous faire une idée de la partie basse et projetons une descente au Champ de Mars, proche du littoral, aménagé au début des années 50 où l'on célèbre à travers plusieurs statues les héros de l'indépendance. 



Autour du Palais présidentiel, effondré lors du séisme, resté en piteux état jusqu'il il y a quelques mois, il est maintenant totalement rasé. Nous prenons l'option moto taxi. A 3, cela ne choque pas ici, nous l'avons déjà vécu au Cameroun, sans casque cela va de soi. Sur la moto de Wikendy, pilote expérimenté, nous filons, quand cela ne bouchonne pas, en descente, vers la ville basse. 



Une foule s'y retrouve ce samedi après midi pour flâner, manger, parler politique en cette période d'entre 2 tours où jouer, c'est Las Vegas autour de tables de jeu artisanales. 



Nous découvrons aussi le monument inachevé et étrange du bicentenaire ressemblant à une pyramide ou un chevalement de mine.
Un arrêt devant la cathédrale Notre-Dame-de-L'Assomption datant du début du 20e siècle et presque totalement effondrée lors du séisme qui a également emporté l'archevêque d'alors, Mrg Joseph Miot. Des projets de reconstruction sont en cours.



Dernière étape, le superbe marché de fer construit dans les années 1890 avec des éléments métalliques transportés depuis Paris, abandonné en 2008, effondré également en 2010 et superbement reconstruit à l'identique. 



Déclaré patrimoine historique sa structure rappelle celle des halles parisiennes. L'édifice original acheté par le président haïtien de l'époque était, paraît-il, destiné à la gare du Caire. On y trouve en plus des fruits, légumes, vêtements et artisanat, tous les accessoires et potions vaudou. 



Le retour en moto est également très agréable et Wikendy slalome entre les voitures, les camions et les Taps-taps, ce véhicule de type pick-up transformé en taxi collectif avec arrêt instantané à  la demande. Sans aucun doute le mode de transport le plus économique à Haïti pour les courts trajets. 



Un nouveau dîner « en famille » nous attend à la Maison Soleil, Rosematte a cuisiné des rougets frits pour le souper qui se terminera avec notre premier ti'punch. Avec modération...en plus c'est vrai !





Jour 4: Un dimanche pas comme les autres


Une immersion pas comme les autres. Alors que nous essayons à chaque voyage de nous déconnecter de notre vie française, focalisés sur notre nouveau pays d'adoption pendant 10 jours, nous suivons autant que possible en direct l'évolution de l'enquête. Nous avons appris aussi le déraillement du TGV en Alsace et ce nouvel attentat à Beyrouth. Nous sommes Charlie, nous sommes Paris et partageons la douleur des familles endeuillées, à Metz tout particulièrement, tout en ayant encore du mal à réaliser ce qui s'est passé. 



Nous avons rendez-vous aujourd'hui avec Martine-Elisabeth Mathieu, nous sommes entrés en contact avec elle grâce à Gilles Vincent qui a longtemps dirigé le jardin botanique de Montréal et qui un ami des Jardins fruitiers de Laquenexy en Moselle. 

Halle "Martine" Berry
Son domaine de compétence c'est l'environnement et elle travaille pour l'Unesco. Martine vient nous chercher à domicile et nous prenons la direction de l'observatoire de Boutiliers d'où nous aurons une vue incroyable sur l'agglomération de Port-au-Prince afin d'en saisir l'ampleur. 


Vu d'en haut, une concentration d'habitations au loin attire notre attention....c'est quoi Martine ? ….le cimetière ! Tout en sirotant notre Prestige, la bière made in Haïti, Martine nous raconte ce qu'elle faisait précisément le 12 janvier 2010 à 16h 53, entre 2 réunions elle a vu s'effondrer l'immeuble en face.  Elle n'aime pas trop en parler. 


On ne connaîtra jamais le nombre exact  de victimes estimé entre 200 et 300 000. L' espoir de repartir sur de nouvelles bases pour la société haïtienne n'a pas été saisi et Martine est aussi pessimiste que Vincent, hier, quant à l'avenir du pays. Nous évoquons les dégâts de la déforestation, cause de catastrophes écologiques mais aussi l'importance de la religion et du vaudou. 


Ingénieur agronome de formation, elle parcourt le monde pour représenter Haïti dans les colloques et conférences internationales. 

La nuit tombe, il est temps de retrouver notre maison Soleil. Rosematte et Jérémie nous attendent pour le dîner, A 21 ans, Elle est lycéenne en seconde, a perdu deux années au moins de scolarité lorsqu'elle a vécu à Saint-Domingue et rêve d'être journaliste. 


A 27 ans, Il est étudiant en ingénierie et sera ingénieur en 2016.Ils prennent l'un et l'autre leurs études très au sérieux Si tout se passe bien, nous passerons demain matin de la maison à la cité Soleil, bidonville et quartier très sensible de Port-au-Prince.


Jour 5: Un, deux, trois Soleil


Nous sommes venus aussi en Haïti pour rencontrer une collégienne, correspondante des lycéens de Saint-Vincent de Paul à Algrange. Nous la retrouverons à l'école mixte Saint-Alphonse. 


Ce que nous ignorions, c'est qu'elle se trouve à la Cité Soleil, l'un des quartiers les plus dangereux de  Port-au-Prince. Nous nous sommes organisés, Georges Toussaint, le directeur, nous accompagnera dans le 4X4 de Dieu...nous sommes donc protégés. Le temps de descendre de Meyotte et de passer les bouchons, de récupérer le directeur et nous entrons dans la Cité Soleil qui paraît bien tranquille. Nous passons un petit groupe que Georges salue, c'est l'un des gangs de la cité. 


Puis nous longeons le pick-up du chef  de gang du quartier avant d'entrer dans l'école où nous sommes en sécurité. 



La cité nous donne une image de propreté, par rapport à d'autres secteurs de l'agglomération de Port-au-Prince. Les maisons sont en brique mais celles en taule ne sont pas bien loin. Nous arrivons en peine récréation. 


Surprise, les élèves portent un uniforme, comme partout en Haïti, mais un uniforme mauve...grenat pour le pantalon au pli parfait, chemise blanche et cravate pour les garçons, jupe écossaise pour les filles. L'accueil est chaleureux. 



Georges, le directeur est un enfant de la cité qui après en être parti avec ses parents est revenu pour y travailler. Le ticket de sortie du bidonville pour tous ces jeunes, c'est l'éducation. 


L'association SOS enfants finance, avec d'autres partenaires, la reconstruction de Saint-Joseph qui s'est effondrée lors du tremblement de terre et organise le parrainage des élèves par des établissements scolaires, familles ou individuels français. 


Une partie des bâtiments sont tout neufs. Après avoir fait le tour des classes, nous retrouvons Darline qui correspond avec le lycée mosellan. A Algrange on nous a dit qu'elle avait 13 ou 14 ans, le directeur pense qu'elle en a 16, Darline nous annonce qu'elle vient d'avoir 18 ans. Elle est en 9ème (4ème chez nous). Elle n'a pas été scolarisée pendant plusieurs années et rattrape son retard. Motivée, elle souhaite devenir infirmière. 


Nous passerons 3 heures dans l'établissement. Ils nous chantent la bataille de Reichshoffen version haïtienne, commémorant celle de Vertières, du 18 novembre 1803 lorsque les troupes napoléoniennes ont été battues. Georges est presque gêné de nous le rappeler. Nous lui précisons que nous n'en prenons pas ombrage et que cette défaite est totalement oubliée en France. Il est temps de quitter la Cité Soleil, une ville dans la ville. Impossible de connaître le nombre de ses habitants qui se chiffre en centaines de milliers.


Totalement abandonnée par le régime, elle vit grâce à l'aide internationale. Il faut ajouter que ses habitants sont parfois « engagés » et rémunérés par certains partis politiques pour semer le trouble en ville. Escortés par le censeur de l'école qui est assis à la droite de Dieu, nous quittons la cité pour revenir vers le Champ de Mars, où en face de la défunte ambassade de France, à terre depuis le tremblement de terre, on vient manger le poulet grillé, à déguster dans la rue et réputé comme le meilleur de Port-au-Prince. Nous pensions voir le drapeau français en berne durant ces journées de deuil national mais comme la nouvelle ambassade n'est pas encore reconstruite, il n'y a pas de toit visible depuis la route. 


Nous poursuivons avec la visite de l'incontournable Musée du Panthéon National Haïtien, le Mupanah avec les bustes des fondateurs de la république et plusieurs siècles d'histoire évoqués dans une demi-douzaine de salles. 


Nous sommes impressionnés par l'ancre originale de la Santa Maria de Christophe Colomb qui s'est échoué sur les côtes haïtiennes. Après le tour officiel avec Christophe le guide, nous continuons à enregistrer avec Maritou, archiviste octogénaire du musée qui a connu personnellement une bonne partie des présidents des dernières décennies dont Papy et Baby Doc ainsi que le terrible père Aristide qui instrumentalise selon elle, plusieurs candidats aux présidentielles. 


C'est le dernier dîner dans notre maison Soleil avec un excellent maïs haricots collés préparé par Rosematte, accompagné d'un merlot chilien que nous avons acheté dans notre supermarché préféré pour fêter notre départ. 


Demain matin, départ pour le sud. Jacmel où nous passerons les dernières journées en bord de mer des Antilles.